fermer

Rejoignez le Carbon Club Aktio !

1 email par mois, 2 articles de fond

Merci, votre inscription à bien été prise en compte !
Il semblerait qu'une erreur soit survenue, veuillez réessayer !
Partager :
arrow_purple
Retour aux articles

Quels risques liés au dérèglement climatique existent pour les entreprises ?

Le risque climat est désormais un risque concret qui doit être évalué, anticipé et intégré à toute stratégie d’entreprise. Dans un contexte d’accélération du dérèglement climatique, l’enjeu est à la fois d’assurer la pérennité de l’entreprise mais aussi sa conformité aux exigences réglementaires croissantes.

Temps de lecture : 5 minutes

Quels sont les principaux risques climatiques ?

La TCFD (Task Force on Climate-Related Financial Disclosures) divise les risques climatiques en deux catégories principales : les risques physiques et les risques de transition. Ils concernent tout autant les acteurs publics et privés que les acteurs financiers.

Les risques physiques

Les risques physiques correspondent aux pertes directes associées aux dommages causés par les aléas climatiques sur les acteurs économiques.

Ces risques physiques peuvent résulter de la survenance d’événements ponctuels rendus plus fréquents et extrêmes par le changement climatique (exemples : cyclones, inondations, ouragans) ou bien de changements climatiques à long-terme entraînant notamment des vagues de chaleur ainsi qu’une élévation du niveau de la mer.

Les risques climatiques physiques peuvent entraîner des conséquences financières importantes pour les entreprises suite aux dommages directs causés aux actifs (par exemple, des bâtiments et infrastructures endommagés, des récoltes perdues) mais aussi aux impacts indirects sur les opérations et la chaîne d’approvisionnement (en raison, par exemple, de l’interruption des réseaux de transport suite aux vagues de chaleur ou aux inondations).

Entreprise de maraîchage victime des crues exceptionnelles de juin 2016 en France

Rails déformés à la suite de la canicule exceptionnelle de l'été 2022 en France, entraînant une perturbation importante du trafic

Par ailleurs, ils peuvent également impacter plus généralement la performance financière de l’entreprise, à la suite de changements dans : 

  • la disponibilité, l’approvisionnement et la qualité de l’eau, indispensable tant pour les employés que pour de nombreuses activités industrielles (agriculture, refroidissement de process industriels et de data center…)
  • l’approvisionnement alimentaire
  • les températures, avec des impacts sur les locaux (ex : climatisation inopérante au-delà d'une certaine température) et les extérieurs (ex : effet îlot de chaleur en ville, renforcé par l’utilisation des climatisations), les opérations mais aussi la chaîne d’approvisionnement ou encore la sécurité des employés (ex : impossibilité de travailler en extérieur en cas de canicule ou pendant les événements climatiques extrêmes)

Les risques de transition

Le cabinet de conseil Carbone 4 définit les risques de transition comme “les conséquences financières d’une transformation de l’entreprise vers un monde bas-carbone”. Ces risques peuvent se diviser en six sous-catégories principales : 

  • les risques politiques, liés à l’institution de nouvelles politiques publiques impactant directement les entreprises : mise en place d’une taxe carbone aux frontières, interdiction de produits fortement émissifs comme les voitures thermiques ou les chaudières au fioul, renforcement des obligations de reporting et d’affichage environnemental, nouvelles contraintes environnementales par secteur, etc. 
  • les risques juridiques liés au non-respect de ces réglementations, mais aussi à l’augmentation des litiges liés au climat portés devant les tribunaux. On peut citer notamment la condamnation de Shell en mai dernier aux Pays-Bas à réduire ses émissions, ou encore la récente mise en demeure de BNP Paribas pour ses soutiens aux nouveaux projets d’énergies fossiles. Le 21 octobre 2022, Emmanuel Macron a par ailleurs annoncé la décision de se retirer du Traité sur la charte de l’énergie, considéré comme freinant la transition énergétique européenne.
  • les risques technologiques, liés au développement de nouvelles technologies émergentes pouvant impacter directement la compétitivité des entreprises, leurs coûts de production et de distribution (par exemple : les énergies renouvelables, le stockage sur batterie, l’efficacité énergétique). Selon la TCFD, le calendrier de déploiement des technologies émergentes permettant de décarboner constitue une incertitude-clé dans l’évaluation du risque technologique.
  • les risques liés aux marchés et à la demande des consommateurs : modification des comportements des consommateurs privilégiant des produits et services bas-carbone, baisse de la disponibilité et/ou augmentation des prix des matières premières, incertitude quant aux signaux du marché, etc.
  • les risques réputationnels liés à l’évolution de la perception de l’entreprise par ses clients, ses parties prenantes mais aussi ses salariés en interne.
  • les risques financiers et d’accès au capital, avec un accès réduit au capital des entreprises dans les secteurs non-alignés avec la transition (cf taxonomie européenne), et en conséquence une moindre valorisation et un risque d’être classifié comme un “actif échoué”.

Pourquoi prendre en compte les risques climatiques ?

Renforcer la résilience de son activité

La prise en compte des risques physiques est essentielle pour limiter les conséquences d’événements climatiques qui peuvent impacter significativement l’activité de l’entreprise et limiter les surcoûts associés. Par ailleurs, la prise en compte des risques de transition permet d’assurer la durabilité de son activité dans le temps en anticipant les conséquences de l’émergence d’une économie bas-carbone et les évolutions réglementaires associées.

L’enjeu est tout aussi essentiel pour les acteurs financiers, qui peuvent ainsi orienter prioritairement leurs investissements vers des entreprises résilientes et ainsi éviter une baisse de la valeur des actifs (exemple : perte de valeur des infrastructures liées à la production d’énergies fossiles).

Anticiper les exigences réglementaires croissantes

La prise en compte des risques climatiques est en train d’être généralisée dans le cadre du dispositif réglementaire du reporting carbone, obligatoire pour les grandes entreprises et les acteurs financiers.

Rappelons, en effet, que le reporting carbone est une obligation pour toutes les entreprises soumises à la déclaration de performance extra-financière (DPEF) et que celui-ci doit mentionner notamment : 

  • les mesures prises pour l’adaptation aux conséquences du changement climatique ;
  • le plan de transition permettant cette adaptation.

👉 En savoir plus sur la déclaration de performance extra-financière !

Les acteurs financiers sont également confrontés à des exigences réglementaires croissantes de transparence quant à l’impact environnemental de leurs investissements. Ainsi, depuis la loi TECV de 2015 (Transition énergétique pour la croissance verte), la France a mis en place une obligation de transparence pour les investisseurs sur la gestion de leurs risques liés au climat. Le dispositif a été récemment renforcé et étendu par la loi “énergie climat” de 2019.   

Au-delà des obligations réglementaires de reporting, il existe aussi de nombreux mécanismes de reporting volontaire, à l’instar du questionnaire CDP, qui visent à répondre aux attentes toujours plus fortes des investisseurs quant à la prise en compte des risques climatiques par les entreprises. 

De manière générale, la prise en compte des risques climatiques, physiques comme de transition, va s’imposer pour l’ensemble des acteurs publics et privés dans le cadre de la nécessaire réduction des émissions de gaz à effet de serre imposée par la Stratégie Nationale Bas-Carbone (en application de l’Accord de Paris) à tous les secteurs d’activité.

Les réglementations nécessaires à la mise en œuvre de la SNBC, tels que le décret tertiaire et la RE 2020 pour le secteur du bâtiment, imposent déjà des investissements importants aux secteurs concernés avec des risques réels pour la stabilité financière des entreprises. La réduction de ces risques nécessite de les anticiper en s’engageant dès aujourd’hui dans une transition bas-carbone.

Comment réduire les risques climatiques ?

Identifier les risques physiques et de transition

La première étape consiste à identifier, de la manière la plus précise possible, les risques physiques et de transition auxquels l’entreprise peut être exposée

L’analyse par scénarios est considérée comme l’outil le plus efficace pour identifier les risques climatiques tout en tenant compte de l’incertitude profonde qui les caractérisent. Il s’agit de la méthode recommandée par la TCFD dans son rapport final.

Le Shift Project définit l’analyse par scénario comme “une méthode de prospective qui consiste par nature à envisager des futurs possibles, et à explorer les cheminements qui y conduisent en vue d’éclairer l’action”, avec trois objectifs principaux : 

  1. confronter les activités de l’entreprise à plusieurs futurs possibles et différents
  2. identifier les risques (et opportunités) pouvant affecter le modèle d’affaires de l’entreprise et évaluer la résilience du modèle d’affaires en place
  3. identifier les pistes d’actions permettant de saisir les opportunités et réduire les risques
Illustration des impacts du changement climatique sur la chaine de valeur d’une entreprise selon différents scénarios (Source : ADEME 2020, « Diagnostic des impacts du changement climatique sur une entreprise. Recueil international d’expériences »)

Bâtir une stratégie bas-carbone ambitieuse pour réduire les risques

Dans un second temps, il s’agit de mettre en place des actions concrètes visant à parer aux risques identifiés. Pour les risques physiques, l’entreprise peut, par exemple, décider de rendre ses infrastructures plus résilientes en réalisant des travaux, ou de s’implanter préférentiellement dans des zones géographiques moins exposées aux aléas climatiques. La réduction des risques physiques pesant sur la chaîne d’approvisionnement peut passer par l’identification de fournisseurs alternatifs, leur diversification en fonction de leur localisation ou encore le fait d’imposer à ses fournisseurs de définir leur propre plan de transition. 

Pour les risques de transition, il s’agira notamment de : 

  • réduire drastiquement les émissions grâce à la réalisation d’un bilan carbone, la mise en œuvre d’un plan d’actions de réduction mais aussi la définition d’une trajectoire carbone ambitieuse et conforme à la science ;
  • limiter la dépendance de l’entreprise aux énergies fossiles autant que possible ;
  • de manière générale, mettre en place une stratégie climat ambitieuse dans l’entreprise grâce à une gouvernance dédiée.

L’entreprise doit également s’interroger sur les moyens de saisir les opportunités offertes par la transition énergétique. Cela peut passer, par exemple, par le développement de nouveaux produits ou services bas-carbone ou encore par la réduction de ses coûts énergétiques par la mise en place d’une démarche de sobriété énergétique

Pour les acteurs financiers, il s’agit principalement d’aligner son portefeuille d’actifs sur une trajectoire bas-carbone

  • d’une part, en évitant les actifs les plus vulnérables et en sélectionnant prioritairement des entreprises qui mettent en œuvre un plan de transition avec des actions concrètes ;
  • d’autre part, en encourageant les entreprises de leur portefeuille à prendre en compte les risques climatiques et à mettre en place une stratégie de réduction ambitieuse de leurs émissions. 

Conclusion

Dans les prochaines décennies, de plus en plus d’entreprises vont être confrontées aux impacts du dérèglement climatique avec des conséquences directes sur leurs activités. Pour s’y préparer au mieux et assurer la pérennité de son entreprise, deux étapes sont nécessaires : identifier ces risques climatiques de la manière la plus précise possible et bâtir une stratégie bas-carbone ambitieuse pour parer aux risques identifiés.