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CSRD : tout comprendre à l’analyse de double matérialité

Au cœur du reporting de durabilité mis en place par la directive CSRD, l’analyse de double matérialité représente un réel défi pour les entreprises concernées. Dans cet article, retrouvez tout ce qu’il faut savoir pour aborder sereinement cet exercice.

💡 A RETENIR

La double matérialité est au cœur du nouveau reporting de durabilité mis en place par la directive CSRD. Elle oblige les entreprises à prendre en compte à la fois :

  • les enjeux de durabilité susceptibles d’impacter leur performance financière
  • les impacts négatifs et positifs de leurs activités sur leur environnement économique, social et naturel

La réalisation de l’analyse de double matérialité revêt un enjeu crucial pour garantir l’exhaustivité et la pertinence du reporting de durabilité. Elle comporte 3 étapes principales :
  1. L’analyse interne des enjeux de durabilité pour identifier et hiérarchiser ses impacts
  2. L’engagement des parties prenantes (salariés, fournisseurs, clients, investisseurs...)
  3. La réalisation de la matrice finale de double matérialité qui servira de base pour le choix des indicateurs à déclarer dans son reporting CSRD

Temps de lecture : 4 minutes

La double matérialité : origine, définition et enjeux

Qu’est-ce que la matérialité ?

À l’origine, le concept de matérialité (materiality) est issu du monde financier : une information comptable est considérée comme “matérielle” à partir du moment où elle est susceptible d’influencer les processus décisionnels. En pratique, la matérialité permet aux investisseurs et analystes financiers de sélectionner les indicateurs les plus pertinents pour juger de la situation financière d’une entreprise.

Ce concept de matérialité a ensuite été transposé dans le milieu de la RSE et du reporting extra-financier, notamment en 2006 avec la Global Reporting Initiative (GRI). La GRI précise que le rapport de développement durable doit “souligner les informations sur la performance relatives aux thèmes les plus pertinents”

Dans le cadre du reporting extra-financier, la matérialité vise donc à permettre aux entreprises d’identifier et de prioriser les questions de durabilité ayant le plus d’impacts sur leur performance financière en fonction de leur secteur, leur taille et leur modèle d’affaires.

🔎 Focus

L’utilisation du concept de matérialité visait avant tout à revenir à une certaine concision et lisibilité dans un contexte où les rapports extra-financiers devenaient de plus en plus documentés et complets afin de répondre aux attentes de la société civile. Elle permet à l’entreprise de limiter son reporting aux enjeux de durabilité qui revêtent une importance prioritaire au regard de ses activités et des attentes de ses parties prenantes.

Concrètement, le concept de matérialité est donc centré sur l’entreprise et sa performance financière, notamment sur la perte de valeur potentielle que certains enjeux de durabilité peuvent faire subir aux investisseurs (exemples : phénomènes météorologiques extrêmes, hausse des prix du carbone, etc.).

Qu’est-ce que la double matérialité ?

Nous avons vu que la matérialité était avant tout centrée sur l’entreprise et sa valeur financière. Cette approche présentait néanmoins certaines limites. En effet, elle induisait que certaines informations importantes d’un point de vue social ou environnemental n’étaient pas prises en compte dans le rapport extra-financier car elles n’étaient pas considérées comme “matérielles”. 

Exemple : l’augmentation du bilan carbone d’une entreprise n’impacte pas directement sa performance financière. Pourtant, ses activités ont un impact significatif sur l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre.

Pour pallier cette insuffisance, différents standards et normes d’information RSE internationaux ont progressivement fait évoluer leurs définitions de la matérialité des enjeux de durabilité jusqu’à distinguer deux perspectives de matérialité : 

  • la matérialité financière (ou matérialité simple) : les questions de durabilité qui peuvent avoir des impacts positifs (opportunités) ou négatifs (risques) sur la performance financière de l’entreprise (on parle de vision “Outside-In”) ;
  • la matérialité socio-environnementale (ou matérialité d’impact) : les impacts négatifs ou positifs de ses activités de l’entreprise sur son environnement économique, social et naturel (vision “Inside-Out”).
Qu'est-ce que la double matérialité ?

L’approche de double matérialité vise donc à aller plus loin que la matérialité financière en prenant en compte également une matérialité d’impact : les enjeux de durabilité qui impactent globalement la société et l’environnement, au-delà de la performance financière stricte de l’entreprise. 

La double matérialité, socle du reporting de durabilité de la CSRD

Le concept de “double matérialité” a été introduit pour la première fois officiellement par la directive NFRD dans son Supplément relatif aux informations liées au climat publié en juin 2019. Mais il est surtout au cœur de la nouvelle directive CSRD qui intègre explicitement le principe de double-matérialité et l’impose comme standard d’identification des enjeux de durabilité les plus importants d’une entreprise. 

La double matérialité irrigue donc profondément le nouveau reporting de durabilité qui entrera progressivement en application à compter de 2024. Concrètement, les entreprises concernées devront réaliser une analyse de double-matérialité leur permettant de définir les enjeux de durabilité les plus “pertinents” pour figurer dans le rapport final. 

👉 Tout savoir sur la directive CSRD et les entreprises concernées !

Au-delà de la mise en conformité réglementaire, cette analyse de double-matérialité permet à chaque entreprise de cerner précisément les enjeux de durabilité prioritaires dans sa situation particulière afin de pouvoir mobiliser les ressources vers les problématiques les plus importantes pour elle et ses parties prenantes.

Notez-le

Le premier jeu de normes ESRS élaboré par l’EFRAG définit les deux matérialités dans les termes suivants :

Matérialité financière : “les risques et opportunités liés au développement durable qui peuvent avoir un impact positif ou négatif sur le développement, la performance et la position de l’entreprise, à court, moyen ou long terme, et, par conséquent, créer ou éroder sa valeur d’entreprise”

Matérialité d’impact : “les enjeux de durabilité qui reflètent des impacts significatifs réels ou potentiels sur les personnes et l’environnement liés aux activités de l’entité elle-même et à sa chaîne de valeur en amont et en aval”

Quels sont les principes de l’analyse de double-matérialité ?

L’analyse de double matérialité telle que mise en place par la directive CSRD et le premier jeu de normes européennes de durabilité ESRS est régie par trois principes :

1. elle doit être réalisée conformément à un cadre prédéfini : en effet, la méthodologie à suivre pour sa réalisation et les enjeux de durabilité à prendre en compte sont précisés par les normes ESRS qui encadrent le reporting de durabilité.

Enjeux de durabilité (ESRS)

Normes environnementales

  • Changement climatique
  • Pollution
  • Eau
  • Biodiversité et écosystèmes
  • Utilisation des ressources et économie circulaire

Normes sociales

  • Main d'oeuvre de l'entreprise
  • Employés de la chaine de valeur
  • Communautés affectées
  • Utilisateurs et consommateurs finaux

Normes de gouvernance

  • Conduite des affaires



2. Les parties prenantes sont au cœur de l’analyse de double matérialité. Cette dernière ne peut correctement se faire qu’en impliquant les parties prenantes impactées, potentiellement impactées et/ou aptes à témoigner sur l’impact des activités de l’entreprise.

3. Les normes ESRS n’imposent pas de format particulier pour la présentation des résultats de l’analyse de double matérialité. L’entreprise peut donc choisir la forme qu’elle considère la plus appropriée. En pratique, le livrable visuel recommandé est l’élaboration d’une matrice de matérialité figurant la matérialité financière en abscisse et la matérialité d’impact en ordonnée.


👉 Exemple de matrice de double matérialité réalisée en 2022 par l’entreprise SANOFI, acteur majeur du secteur pharmaceutique.

Quelles sont les principales étapes de l’analyse de double matérialité ?

3 étapes pour réaliser son analyse de double matérialité

L’analyse interne de la double matérialité

Cette première étape de l’analyse de double matérialité peut elle-même être sous-divisée en quatre étapes : 

  • L’identification des enjeux de durabilité, du périmètre de l’analyse et des objectifs stratégiques de la démarche : l’entreprise doit identifier distinctement les enjeux de durabilité pour la matérialité financière et la matérialité d’impact. À noter que certains enjeux peuvent être liés indirectement à l’entreprise car liés à sa chaîne de valeur : ils doivent être évalués en tant que tels.

    La liste des enjeux de durabilité telle qu’établie par les normes ESRS reste très générale et doit être affinée pour obtenir des enjeux plus spécifiques et parlants dans votre secteur d’activité. Cela peut passer notamment par une recherche documentaire sur la prise en compte des enjeux ESG dans votre secteur d’activité ou une étude des analyses de matérialité réalisées par vos concurrents.
  • Le recensement des interlocuteurs concernés en interne et des données disponibles : l’entreprise doit identifier les interlocuteurs clés en interne à associer tout au long de la démarche et rassembler toutes les données disponibles pour procéder à l’évaluation de la double matérialité. 
  • L’élaboration du modèle et des outils d’évaluation : l’objectif de cette étape est d’établir un outil Excel permettant de procéder de manière simple à l’évaluation de la matérialité d’impact et la matérialité financière, notamment à partir des recommandations de l’EFRAG. A noter : l’EFRAG fournit certaines recommandations opérationnelles pour évaluer la double matérialité et notamment des grilles de scoring permettant d’aider les entreprises à évaluer la matérialité pour chaque enjeu identifié.
  • L’évaluation de la double matérialité : l’entreprise doit l’effectuer à partir des données collectées et à l’aide des outils développés au cours de l’étape précédentes.

Analyse interne

Identifier les enjeux de durabilité

Recenser les données disponibles

Elaborer le modèle et les outils d'évaluation

Evaluer la double matérialité

L’engagement des parties prenantes

Comme pour l’analyse interne, l’engagement des parties prenantes comporte aussi quatre sous-étapes : 

  • L’établissement d’une cartographie des parties prenantes : à noter que l’EFRAG distingue deux catégories de parties prenantes :
    • les parties prenantes affectées (stakeholders), c’est-à-dire celles qui peuvent être affectées positivement ou négativement par les activités de l’entreprise et/ou de sa chaîne de valeur
    • les utilisateurs de l’information (users) : ce sont les parties prenantes pouvant être intéressées par le rapport de durabilité de l’entreprise (pouvoirs publics, investisseurs, partenaires, etc.)
  • La définition des thèmes, métriques et outils de la consultation des parties prenantes : cette étape vise à définir la “boîte à outils” et le déroulement de la consultation des parties prenantes. Elle se base sur les enjeux de durabilité identifiés par l’entreprise lors de l’analyse interne.
  • La consultation des parties prenantes : l’entreprise recueille les perceptions, préoccupations et attentes prioritaires des parties prenantes, notamment par le biais d’entretiens et d’outils digitaux (questionnaires, etc.).
  • Le traitement et l’analyse des données de la consultation : l’entreprise consolide et analyse des résultats de la consultation des parties prenantes et rédige un rapport de consultation.

Engagement des parties prenantes

Carthographier les parties prenantes

Définir les outils de la consultation

Consulter les parties prenantes

Analyser les données

Consolidation de la matrice de double matérialité et rapport final

Enfin, intervient l’étape finale de consolidation de la matrice de double matérialité et de reporting. Elle passe notamment par l’ajustement des résultats de l’analyse interne en y intégrant les résultats de la consultation des parties prenantes puis par la réalisation de la matrice de double matérialité finale et sa validation par la direction de l’entreprise.

Consolidation et reporting

Ajuster l'analyse interne aux résultats de la consultation

Etablir la matrice de double matérialité finale

Conclusion

La réalisation de l’analyse de double matérialité constitue un point de passage obligé pour toutes les entreprises concernées par le nouveau reporting de durabilité. Elle suppose de se préparer suffisamment en amont afin de disposer de l’ensemble des données nécessaires pour la première échéance de reporting. Aktio peut vous accompagner tout au long de votre démarche d’analyse de la double matérialité pour votre entreprise, n’hésitez pas à contacter nos équipes.